L’absence de gouvernement et une constitution qui ne permet pas au Parlement de travailler correctement créent une situation inquiétante pour le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). En effet, les premiers éléments disponibles indiquent que le ministre de l’Économie démissionnaire demande des économies supplémentaires et que les premières discussions au conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie ont montré la volonté d’imposer de nouvelles réductions des dépenses.
Alors que jusqu’à présent cette politique était appliquée sans protestation par les instances hospitalières malgré les difficultés rencontrées, pour la première fois des critiques se font officiellement entendre. Ainsi la Fédération hospitalière de France, représentation institutionnelle des hôpitaux, demande dans un communiqué publié par son instance de la région Normandie des moyens supplémentaires immédiats face à une situation budgétaire catastrophique dans les établissements.
En ce qui concerne les hôpitaux, il est annoncé un doublement du déficit entre 2022 et 2023 avec des conséquences graves, je cite : « Il est urgent de renforcer les moyens alloués au secteur public pour préserver un accès équitable aux soins pour tous et garantir la qualité de service ». Ce qui est par ailleurs nouveau est la critique clairement affirmée de la carence du secteur privé lucratif qui se désengage des activités considérées comme « non rentables » comme les services d’urgence ouvert 24h sur 24 ou encore les maternités. Pour les EHPAD, la situation n’est pas meilleure avec un résultat déficitaire dans 85 % des EHPAD publics. Là aussi les mots sont durs : « Cette situation budgétaire extrêmement difficile n’est pas tenable…. Il est nécessaire de mettre en œuvre une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge afin de prévoir et organiser les financements et l’attribution de ressources humaines pour les établissements médico-sociaux publics ».
En bref, cette institution conteste le bilan présenté par le ministre de la Santé récemment dans les médias et, grande nouveauté, les solutions proposées sont en ligne avec le programme du Nouveau Front populaire. En effet, il est clairement affirmé que le problème n’est pas celui de dépenses excessives mais celui de budgets insuffisants. Il s’agit donc bien d’augmenter les recettes et non pas de poursuivre les plans d’économies imposées au fil des ans.
Il y a donc urgence que, gouvernement ou pas, l’Assemblée nationale prenne en main immédiatement la question du prochain budget de la Sécu et impose une rupture en proposant de nouvelles recettes, comme par exemple celles proposées dans ma chronique du 15 juillet qui permettrait de dégager immédiatement 18 milliards d’euros, soit plus que le déficit prévu de la Sécu pour 2024. Et qu’on ne nous oppose pas le déficit excessif de la France, car ces mesures sont basées non sur de l’emprunt mais sur des recettes supplémentaires obtenues notamment en réduisant les exonérations de cotisations offertes aux entreprises et qui ont fait exploser leurs bénéfices, ainsi qu’en supprimant des impôts injustes et en en rétablissant d’autres plus justes.