Le billet d’humeur de la semaine du Dr Christophe Prudhomme
Tant pour la santé que pour les retraites, les arguments du gouvernement sont des mensonges dont l’objectif est de basculer vers le secteur marchand et financier tout ce qui peut être rentabilisé dans ces secteurs qui, en France, mobilisent jusqu’à aujourd’hui essentiellement des fonds publics. Dans le domaine de la santé, les déficits de la Sécurité sociale sont sciemment créés pour imposer des plans d’économies dont l’objectif est de dégrader la qualité des services publics afin d’imposer l’alternative d’un secteur privé qui saurait mieux gérer ces activités.
La dernière escroquerie dans le domaine est le plan d’investissement du Ségur de la santé avec l’annonce d’une somme mirifique de 19 milliards sans jamais préciser que son déblocage sera étalé sur 10 ans. Somme très insuffisante par rapport aux besoins. Pour les seuls CHU, la dette cumulée est de 13,5 milliards, ce qui bride leurs investissements alors que le taux moyen de vétusté des bâtiments est de près de 60 % et celui des équipements d’environ 80 %. En termes de gestion courante, le déficit pour le plus grand hôpital d’Europe que constitue l’AP-HP est estimé pour 2023 à 400 millions d’euros, malgré la vente des bijoux de famille que constituent des terrains et des immeubles situés en plein cœur de Paris. Cette situation va engendrer de nouvelles fermetures de lits et d’activités laissant ainsi la place au privé lucratif.
Ainsi, tant pour les retraites que pour la santé, les causes sont les mêmes et sont clairement identifiées : il s’agit de la baisse des ressources liées aux exonérations de cotisations, de leur transformation en impôt, à l’instar de la CSG, et surtout du refus d’augmenter les taux de prélèvement. Or l’argent ne manque pas du côté du privé pour financer ces secteurs. Quelques chiffres sont particulièrement éclairants. En 2019, le total mondial des actifs des fonds de pension était de 32 000 milliards de dollars mais ils représentaient seulement 22 milliards en France, soit 0,8 % du PIB alors que ce chiffre est de 123 % pour le Royaume-Uni et de 191 % pour les Pays-Bas.
En ce qui concerne la santé, l’exemple des États-Unis est éclairant, les dépenses représentent plus de 17 % du PIB alors que ce chiffre est de 12 % pour la France. Ce niveau très élevé ne met pas le pays en faillite, il génère bien au contraire un très bon retour sur investissements pour les actionnaires. Par contre pour la population, ce système est catastrophique avec une espérance de vie qui diminue depuis 2014 et qui est maintenant une des plus basse des pays développés. En ce qui concerne les retraites, la France est en tête pour le niveau de vie de ses retraités qui participent largement à l’activité du pays du fait de leur investissement, notamment dans les associations, sans être obligés de subir un travail imposé par la faiblesse de leurs pensions.
Conclusion : il est indispensable de refuser ces modèles en obtenant le retrait de la réforme des retraites et en exigeant un financement de la Sécurité sociale à hauteur des besoins.