Le billet d’humeur de la semaine du Dr Christophe Prudhomme
Emmanuel Macron et son ministre de la santé ne peuvent plus cacher à la population l’état de dégradation profonde de notre système de santé. Alors que nous nous targuions d’avoir soi-disant le meilleur système de santé au monde au tournant du siècle, 20 ans plus tard, l’organisation Samu-Urgences de France, présidée par F. Braun jusqu’à sa nomination comme ministre, décompte depuis plusieurs semaines les « morts évitables » dans les services d’urgence et les SAMU.
Cela ne va pas beaucoup mieux en ville où le nombre de médecins généralistes ne cesse de baisser avec 6,5 millions de Français sans médecin traitant. À cela s’ajoute un système de financement renforçant les inégalités avec la généralisation des dépassements d’honoraires pour les spécialistes et une augmentation du renoncement aux soins pour des raisons financières. Dans le médicosocial, la situation est encore pire, avec le scandale d’ORPEA et plus généralement une prise en charge défaillante des résidents dans les EHPAD. Depuis des années, nous sommes un certain nombre à donner des explications précises sur les causes de cette dégradation que beaucoup ont refusé de voir en face, pensant que quelques aménagements du système seraient suffisants pour régler les problèmes.
Il faut bien reconnaître aujourd’hui la réalité qui est que les libéraux considèrent la santé comme un service marchand au sein duquel les investisseurs peuvent dégager de juteux profits du fait d’une importante socialisation des dépenses et de marchés captifs, car il est rare que les patients puissent faire jouer une « concurrence libre et non faussée au sein d’un grand marché mondialisé ». Il est donc urgent d’engager un véritable débat sur le choix d’évolution de notre système de santé. D’un côté le secteur privé avec des médecins libres du montant de leurs consultations, des établissements privés lucratifs et des compagnies d’assurance aux primes variables en fonction de son niveau de risque. D’un autre côté un service public de santé pour la ville et l’hôpital permettant à chacun d’avoir un médecin traitant et un hôpital avec un service d’urgences à moins de 30 minutes de son domicile, avec un financement par la sécurité sociale, collecteur unique de cotisations et payeur unique de prestations, gérée majoritairement par les financeurs, c’est-à-dire les assurés sociaux.
Une solution s’offre à nous pour cela : exigeons un référendum avec la question suivante : « Le système de santé doit-il relever exclusivement du secteur public, en excluant toutes les activités marchandes ? » Je suis un éternel optimiste et je crois que la réponse serait massivement oui. Ce n’est pas la première fois que je fais cette proposition mais je pense qu’au regard de la gravité de la situation, l’urgence est là pour offrir une véritable alternative politique à l’accélération de la destruction de notre système social par les tenants du néolibéralisme. C’est mon vœu le plus cher pour 2023 !