Les puits de carbone terrestres mondiaux se sont effondrés en 2023

Le taux de croissance du CO2 dans l’atmosphère a augmenté de 86  % en 2023 par rapport à 2022 et cette hausse vertigineuse est causée par l’effondrement des puits de carbone terrestres, dont les forêts, selon une étude universitaire internationale présentée lundi 29 juillet.

À la fin de l’année dernière, la publication des mesures d’émissions de CO2 d’origine fossile (combustion de charbon, de pétrole ou de gaz) pour 2023 pouvait déjà alarmer. En augmentation de 1,1  % par rapport à 2022, elles démontraient que les efforts de réduction étaient encore très loin de ce qu’il faudrait faire. La conséquence logique  : une augmentation du taux de CO2 dans l’atmosphère et l’année 2023 classée comme la plus chaude jamais enregistrée par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), avec 1,48 °C de plus que les années 1850-1900, très près des 1,5°C de la limite fixée par les accords de Paris.

Le rapport présenté ce 29 juillet est effrayant. Issu du travail d’universitaires de cinq pays (Allemagne, Chine, États-Unis, France, Grande-Bretagne), dont Philippe Ciais, du laboratoire des sciences du climat et de l’environnement de Paris-Saclay, il démontre que le taux de croissance du CO2 dans l’atmosphère a bondi de 86  % entre 2022 et 2023, atteignant un niveau record depuis le début des observations en 1958.

Cette augmentation ne pouvant provenir à elle seule de l’augmentation des émissions, même record, elle implique selon les chercheurs « un affaiblissement sans précédent des puits terrestres et océaniques ». Parmi les premières causes, l’étude identifie « la perte anormale de carbone en Amazonie pendant la sécheresse de la seconde moitié de 2023 » et des « émissions extrêmes dues aux incendies au Canada », avec 184 961 km2 brûlés, soit plus de 2,5 fois le pic enregistré précédemment et six fois la moyenne décennale

« Si cet effondrement se reproduisait dans les prochaines années, prédit Philippe Clais interrogé par Le Monde, nous risquons d’observer une augmentation rapide du CO2 et du changement climatique au-delà de ce que prévoient les modèles ». Depuis 2015, souligne l’étude, « l’absorption de CO2 par les terres au nord de 20°N a diminué de moitié ».

Chaque pays, à sa mesure, doit absolument tout faire pour préserver les puits de carbone terrestres qu’il abrite. En France hexagonale, les surfaces arborées des forêts et les plantations couvrent le tiers du territoire. Les plantations, à la biodiversité réduite, très majoritairement constituées de résineux, sont bien plus fragiles face aux risque d’incendie que les forêts diversifiées au couvert continu, riches en biodiversité, dont la végétation étagée permet de conserver l’humidité et de réduire la température. Entre les sous-bois et l’extérieur de la forêt, la différence peut atteindre jusqu’à 15°C  !

La logique écologique commande donc de réorienter radicalement les moyens de l’État et des collectivités vers une gestion de forêts diversifiées et de cesser l’aberrante gestion à court terme qui ne satisfait que les intérêts financiers.